01/03/2015

Artemisia Gentileschi, une flèche qui transperce les genres





Artemisia Gentileschi, artiste peintre italienne née à Rome en 1593 et supposément décédée aux alentours de 1654, connut une grande renommée durant sa carrière et parvint à atteindre un statut social élevé, conformément à sa grande ambition. Alors que la scène artistique du XVIIe siècle est majoritairement masculine, Artemisia est parvenue à s’imposer comme une figure majeure de l’art italien de l’époque. Sa reconnaissance sociale et institutionnelle est due à de nombreux facteurs : son art, sa persévérance, sa capacité d’adaptation à la demande, mais aussi à la curiosité que pouvait présenter une femme peintre aussi peu conventionnelle qu’elle. Mais au-delà de sa renommée, son traitement des figures féminines est particulièrement innovant. Dans la plus belle partie de sa carrière, Artemisia se passionne pour les grandes figures féminines qui ont marqué la mythologie biblique ou profane : Judith, Madeleine, Suzanne, la vierge Marie, Lucrèce, Cléopâtre, Yaël, Esther ; sur les cinquante-sept œuvres attribuées à Artemisia par R. Ward Bissell, quarante-neuf représentent des femmes en tant que principal ou second protagoniste. Mais ce n’est pas le nombre de figures féminines qui compte, mais bien la manière de les interpréter. Artemisia ne peint pas la Femme essentialisée et fantasmée de ses compères ; elle redonne à ces figures héroïques toute la puissance qui leur revient, elles deviennent des êtres humains à part entière qui se distinguent par leur force.

Dans une lettre à Don Antonio Ruffo, son dernier mécène, elle écrit : « Vous trouverez en moi l’esprit de César dans une âme de femme » 1. Joindre les deux genres en un individu, dépasser la condition des femmes de son époque, se présenter elle-même comme une figure exceptionnelle et héroïque : telle est l’ambition d’Artemisia, qui se reflète dans ses œuvres.